Je suis pilote d'ULM


[Copilote dans le FK9 de Patrick, à plus de 9000 pieds] Si si, c'est vrai, et cette page va vous donner plus d'explications ! [Un J300]
Un avion Ultra Léger Motorisé


Tout d'abord, bon nombre de ceux qui liront cette page ne savaient pas que je préparais cette formation. J'ai évité d'en parler pour la raison suivante : j'ai souvent de grands projets, et certains peuvent me prendre du temps, voir beaucoup beaucoup de temps. Il m'arrive de les faire traîner en longueur pour la simple raison de leur trop grand nombre. Parfois, des raisons indépendantes de ma volonté ralentissent ces projets. Bref, ça dure !
Quand j'en parle autour de moi, périodiquement, on me questionne (ce qui est bien naturel, et fait preuve d'intérêt) sur leur avancement.
Comme ils n'avancent pas aussi vite que je le souhaite, je me vois contraint de répondre négativement à chaque fois, et cela me décourage grandement.
Pour ce projet concernant l'ULM, je savais dès le début que ce serait long, alors j'ai pris l'option dès le début de me taire.

Aujourd'hui, je vous l'expose, et vous comprendrez pourquoi dans cette page.

Par endroit, la chronologie n'est pas exactement respectée afin de suivre certaines évolutions logiques.
Ce texte est rédigé à titre privé, et n'a rien à voir avec la FFPLUM.
Ces propos n'engagent que ma personne privée, et en aucun cas ma fonction au sein de la FFPLUM.

Tout commence par internet

Au milieu de l'année 1999, je suis en stage chez Com6, qui conclue ma formation d'ingénieur à l'ISIMA.
Je surfe un peu sur internet, et je découvre le site web de la fédération française d'ULM, qui me donne quelques informations sur la manière d'accéder au pilotage d'un ULM. Je découvre que le principe est identique au permis automobile : il faut passer une épreuve théorique et une épreuve pratique. Les deux épreuves sont indépendantes, et l'on peut très bien commencer les cours pratiques sans la théorie (bien qu'il soit conseillé d'avoir les connaissances théoriques avant d'aller sur une piste).

Je prends donc contact avec la fédé afin d'obtenir la liste des instructeurs dans le Puy-de-Dôme. Je constate qu'ils ne sont pas très nombreux, et ceux qui enseignent le pilotage du trois-axes sont encore le sont encore moins.
(Le trois-axes est un type d'ULM qui ressemble à un avion, c'est celui-ci que je sais piloter.
Le pendulaire est celui qui ressemble à une aile de deltaplane, le paramoteur est un parapente muni d'un moteur, l'autogire est un mini-hélicoptère et l'aérostat est un mini-zepellin. Tous ces engins sont des ULM. Devant tant de vulgarisation, je ne saurais trop vous conseiller d'aller voir les photos et description des cinq classes d'ULM sur cette page.)

Premier cours

En fin d'année 1999, je me décide donc pour un instructeur à Issoire, qui possède un superbe ULM (un MCR je crois), et qui répercute le coût de son appareil sur ses tarifs de leçon (650 fcs/heure, arghh). Cet instructeur est très sympa, et géographiquement proche (20 min.), mais ses méthodes sont difficiles à suivre.
Les leçons sont en effet données par séance d'une heure, ce qui est bien trop long. Il faut savoir qu'en montant dans un aéronef, on perd 30% de ses capacités physiques et mentales. Etant un élève, je suis épuisé au bout de 30 minutes, et le reste de la leçon est assez morose.

Les premiers cours sont assez éprouvants, et un ennui supplémentaire se profile : le service militaire. En effet, à l'époque, j'étais encore sursitaire, et l'idée de devoir tout oublier pendant dix mois, et devoir tout réapprendre en sortant me décourage.

Tout continue sur Internet

Ayant acheté le manuel du pilote ULM, je bûche un peu la théorie sans conviction, bien décidé de reprendre après le service militaire, ce qui repousse tout de même énormément l'échéance.
Puis survient un évènement qui va conclure ces hésitations : la tempête de fin 99 détruit complètement l'un des deux hangars de l'instructeur, et endommage passablement l'autre. Bien sur, les appareils contenus dans les hangars ne peuvent plus voler.
Toutes ces circonstances font que j'arrête l'apprentissage de l'ULM.

Néanmoins, je veux trouver un moyen de m'informer et d'entrer dans le monde de l'ULM, je veux comprendre, apprendre, découvrir.
Retour sur le site web de la fédé... je découvre que le responsable du site souhaite passer le flambeau. Je postule... entretien avec le vice-président, Jean-Paul Ruff, hyper-sympa, et je suis "engagé". "Engagé" car tout cela est fait bénévolement.

A l'époque, chez Com6, je travaille beaucoup sur des problèmes de portabilité de pages web, et je suis assez pointu sur la conception de pages web lisibles avec tout navigateur. Je commence donc par modifier le site pour qu'il soit accessible à tous.
Puis on me demande d'ajouter des articles, de modifier des pages, de supprimer/ajouter des chapitres, ce qui représente pas mal de travail... J'ai un peu de mal à suivre, d'autant que c'est une activité extra-professionnelle.

Je vais donc recréer complètement le site, aidé pour l'aspect graphique par Sandrine Taffonneau. Je le structure, le classe, le code en ASP, piochant ses informations dans une base de données. En français, je le rend dynamique, donc attractif.
Mais je suis toujours obligé d'ajouter les nouveaux articles à la main. Je me lance alors dans un énorme chantier, celui de le ré-écrire complément une troisième fois en PHP, de sorte que les utilisateurs eux-mêmes puissent ajouter des articles. Ce chantier prend fin en septembre 2001, ouf !

Internet, un lieu de rencontre... non-virtuel !

Durant ce temps, aux alentours du début de l'année 2000, je découvre une communauté virtuelle : une liste de diffusion (mailing-list) de francophones, passionnés d'ULM. Son nom : la liste "ULM sur le net". Les membres sont appelés les listards.
Le principe : chaque mail envoyé est reçu par tous les membres. On y discute de météo, de mécanique, de voyages, de réglementation, etc...
Je m'y inscris (c'est entrée gratuite pour tous ;o) et me présente comme le veut la coutume. Je suis dans mes petits souliers : être responsable du site web de plus de 7500 licenciés sans être soi-même pilote, c'est assez gênant... Mais l'accueil est très chaleureux.

Ne croyez pas qu'il s'agit de forcenés asociaux qui préfèrent la compagnie de leur écran au contact humain. Bien au contraire, la liste n'est qu'un moyen de communication qui leur permet de se rencontrer dès que possible. En effet, en plus des petites rencontres informelles, les participants se réunissent chaque année, et pour l'année 2000, je suis invité.
Par timidité, ou à cause d'une autre invitation le même jour, je n'y suis pas allé. Je m'en suis mordu les dents bien des fois ensuite (référence Coluche (c)).
Quoi qu'il en soit, j'ai eu droit aux récits des participants, aux photos, et l'envie d'y aller l'année suivante.

L'organisateur de cet événement est un pilote belge, Patrick Slosse, une personne qui va beaucoup compter pour moi par la suite. Nous discutons beaucoup, il m'explique pas mal de trucs et m'encourage. N'entrons pas dans des détails privés, mais c'est désormais un ami très cher.

Le temps passe, les discussions aussi, et nous voila déjà en juin 2001. Le rassemblement annuel se profile, il aura lieu à Vicq sur Nahon, au centre de la France.
L'aéro-club qui accueille cet évènement s'appelle l'Echalier, et appartient à Helmut Moszkowicz.
Clin d'oeil du destin : avant de m'intéresser à l'ULM, j'avais passé quelques jours en vacances dans la région, et c'est Helmut qui m'a amené en baptême de trois-axes, sur J300, le même appareil que celui que je pilote aujourd'hui.
Ce rassemblement sera chaleureux et convivial. J'y découvrirai les différentes figures de la liste, leurs machines, leurs caractères. C'est impressionnant.
Le dimanche sera consacré à une longue nav' (navigation, promenade) pendant laquelle nous survolerons d'innombrables châteaux. Etant le chouchou, j'ai droit à la place de passager de Patrick, à bord de son FK9 Mark 3, un très très bel ULM.
Perrine vit son baptême de pendulaire avec le très sympathique François Tison.

Nous rentrons hébétés. Je suis avide de voler encore, décidé à prendre le manche dès que possible.

La théorie, heu...

Au début de l'année 2001, je me renseigne sur les sessions d'examens théoriques, et il s'avère qu'il y en a une début février.
Je me mets à bûcher comme à la bonne époque étudiante, demandant des conseils aux listards, sur le net...
L'examen est un Questionnaire à Choix Multiples de quarante questions, et on ne doit pas dépasser dix fautes. J'en fais sept, ce qui est miteux. La session se déroule à la DGAC qui siège à l'aéroport d'Aulnat, l'entrée est libre et gratuite.
Je ressort avec mon théorique en poche, avec une légère impression de l'avoir gagné à la va-vite. Les listards m'assureront par la suite que bon nombre de connaissances s'acquièrent ou se figent par la pratique... bon.

Le paradis se trouve en Combrailles

Aux alentours de juin 2001, je me convainc qu'il est trop bête de cesser de vivre en attendant le service militaire, que j'espère pouvoir éviter.
Par la suite, celui-ci sera supprimé et j'y échapperai, mais à l'époque, je préfère foncer et vivre ma passion.
Je découvre donc l'aéro-club des Combrailles, dont le président est un pilote de chasse à la retraite, ancien pilote de la patrouille de France, et instructeur bénévole, Bernard Ponsot.
Lorsque j'arrive sur le terrain, il commence par m'emmener en "baptême", et me fait vivre des virages à forts angles, histoire de tester mon aptitude à résister aux "G", ces accélérations qui compressent les passagers au fond du siège.
Je résiste, bon pour la suite.
Et c'est ainsi que commence tout un été d'apprentissage du pilotage. Chaque samedi et dimanche après-midi, je tente de voler deux fois 25 minutes, selon la météo et la disponibilité des ressources humaines et matérielles.

Les premiers vols sont consacrés à apprendre une chose toute bête : voler droit ! En effet, un trois-axes dans les mains d'un novice a tendance à voler "en crabe" (si si, c'est possible) et on se doit de diriger le nez de l'appareil dans le sens du vol.
Ensuite, même exercice mais en virage. Puis vient l'apprentissage des montées et descente, éviter les décrochages...

On apprend également à décoller, ce qui peut paraître banal, mais qui demande quand même un peu de concentration. (J'ai su décoller au bout de trois heures de cours environ)
Puis on commence les attéros (atterrissages), et c'est là que ça se gâte.
D'abord, rester dans l'axe de la piste, avec un vent de travers qui souffle en rafales. Ensuite, arriver avec suffisamment de vitesse, pour éviter le décrochage trop tôt. Puis arriver avec le bon plan de descente, ni trop haut, ni trop bas. Si trop haut, on dois faire des virages histoire de perdre de la hauteur. Si trop bas, on doit remettre les gaz.

A noter que la pratique et l'apprentissage de l'ULM sont complètement axés sur la maîtrise de la panne : à chaque minute du vol, on doit garder un oeil sur un terrain susceptible de nous accueillir en cas de panne, et l'élève est formé pour se poser sans moteur.
Ce n'est pas du tout une vision tragique des choses, mais un comportement responsable et prévoyant.
D'ailleurs, en finale (avant de poser l'appareil), on réduit complètement le régime moteur, planant jusqu'à toucher les roues.

Les séances se poursuivent jusqu'à l'automne, et les progrès sont visibles. Je note mes vols dans un... carnet de vol, non obligatoire en ULM, contrairement à l'avion.

Le grand jour

Voyant que je me montre capable de prendre les commandes seul, mon instructeur me déclare que je suis "lachable".
Le lacher est ce grand moment, cette deuxième naissance, le jour où on décolle enfin seul à bord, et surtout qu'on atterrit seul.
C'est une grande émotion, mais la météo m'empêchera pendant de nombreuses semaines de tenter le solo.
Alors je ronge mon frein et je surveille le ciel...

Le 16 novembre, je rejoints mon frère Martin à Lyon pour mon baptême de slam à un concert de Mass Hysteria, un autre très grand moment.
(Le slam est ce geste débile qui consiste à sauter depuis la scène dans la foule pour être plus ou moins rattrapé par les malheureux spectateurs.)
Le lendemain; 17 novembre 2001, j'emmène Mart' au terrain, et je lui paye un baptême (c'est mon instru qui pilote). Il font un peu de voltige, et Mart' pilote un peu, très cool.
Il descend de l'ULM vers 14h20. Je monte faire quatre tours de pistes avec attéros avec mon instru, pas de problème, sauf le premier trop long... Je descends de la machine vers 14h50.
A 15h00, l'ensemble des membres de l'aéro-club doit se réunir pour une réunion extraordinaire. Donc, contrairement à l'habitude, tout le monde est là, même des pilotes que je n'avais jamais vu. C'est la foule.
Et là, mon gentil instructeur demande à la foule "Ca ne vous dérange pas si on prend quelques minutes pour le lacher ?"
!!! PRESSION !!!
Bien sur, les anciens, trop content de voir ça, me brocardent gentiment, avec force proverbes et railleries. ("C'est pas bon de mollir"...)
Bon alors j'y vais, mon instru me suit à la radio.

Je me place en seuil de piste, quelques vérifications habituelles, essence, instruments, ceinture, portes, compensateur, manche, palonnier...
Je pousse la manette des gaz à fond en avant, et grosse surprise, je décolle immédiatement, après un roulage très court.
Hé oui, j'avais complètement oublié qu'étant seul, la machine ne réagirait pas de la même façon. C'est très agréable, très maniable.
Je fais mon tour habituel, me place à 250 mètres, vitesse 80 km/h en montée, je fais mes virages, et me place en étape de base (perpendiculaire à la piste).
C'est là que c'est délicat, car il faut savoir QUAND baisser les gaz, pas trop tôt car on chuterait, pas trop tard car on se retrouverait trop haut.
Bon, ça me paraît bien, je baisse (hé hé, le bruit du silence en vol, quel pied !).
Dernier virage, je me retrouve en final, bien aligné à la piste (j'ai toujours été assez fort en alignement).
Et maintenant, je surveille le plan de descente... ça à l'air bon. Mon instru me le confirme à la radio, je continue.
J'arrondis, l'appareil se retrouve à voler en palier (à plat), à environ un mètre du sol, et il commence à perdre de la vitesse. Parfait.
La vitesse chute, je tire sur le manche, histoire de faire toucher trois points, et je me pose, nickel !
(Il existe deux types de train d'atterrissage : le train classique, avec le train principal à l'avant (les deux grosses roues) et une roulette de queue, et le train tricycle, avec le train principal à l'arrière et une roue unique à l'avant. Le J300 est un train classique, qui est plus difficile à poser. On doit obligatoirement faire toucher les trois roues en même temps, sans quoi l'appareil se cabre et remonte, donc finit par rebondir)
Mon instructeur me demande de remonter la piste, et de refaire un tour, ce que je fais immédiatement, dans les mêmes conditions, et voila.
Je remonte la piste, range la machine, en descends et tout sourire, je serre un million de mains qui me félicitent, mon frère le premier.

Quel beau moment, quel beau week-end !

La suite

Pour continuer, voila ce que sera mon avenir de pilote. Je dois continuer à voler deux ou trois heures seul afin d'obtenir officiellement le brevet de pilote ULM (spécifique à chaque classe d'ULM). Ensuite, je dois voler entre 20 et 40 heures seul pour obtenir "l'emport passager", qui me permettra d'emmener des personnes à bord.

J'adore le trois-axes pour sa robustesse, son confort, sa vitesse, mais je suis aussi attiré par une classe complètement opposée, le paramoteur. Je pense que je vais m'y intéresser sérieusement l'année prochaine, si j'en trouve le temps et les moyens.
Dans un lointain avenir, pourquoi ne pas s'acheter un trois-axes, un jour...

Je compte bien voler tant que la météo le permet, histoire de gagner mon emport passager au plus tôt, pour pouvoir te faire voler à mes côtés, toi qui achève la lecture de cette page.

A bientôt

Nicolas Ecarnot